1èr éd. :
janvier 2008, éditions DUPUIS.
80 pl. coul.
Collection Aire Libre
il existe une édition spéciale 20 ans Aire Libre agrémentée d'une
jaquette et d'un dossier inédit (tirage : trois mille exemplaires)
Etienne,
détective privé de travail et d'amour, gagne le gros lot du loto. Mais
entre posséder un ticket gagnant au fond de sa poche et déposer le
véritable magot sur son compte en banque, se situe un espace temporel
où la chance peut encore jouer les girouettes. Par exemple, si Etienne
se rend dans une soirée et ingurgite trop d'alcool au point que ses
amis lui interdisent de reprendre sa voiture, au point qu'il se trompe
de ligne de RER, au point qu'il s'embrouille avec des punks qui lui
volent son portefeuille... C'est le principe de l'avalanche: la boule
de neige qui devient de plus en plus grosse. Mais l'avalanche ne
connaît qu'une seule manière de s'arrêter : la chute au fond du ravin.
Ainsi, en quelques jours, en quelques heures, Etienne, le millionnaire
virtuel va peut-être voir sa vie basculer plusieurs fois.
Extrait de l'entretien parue dans DBD (Février 2008)
Charles
Berbérian : À la base, il y a cette histoire de quinze pages écrite par
Jean-Claude pour un collectif financé par le métro toulousain
[Correspondances, paru chez Albin Michel en 2003]. Comme nous aimions
son univers et ses personnages, nous avions eu envie de retravailler
avec lui.
Philippe Dupuy : C’était intéressant de laisser libre champ à un autre scénariste en nous limitant à la partie graphique.
JC
Denis : En ce qui me concerne, c’est un peu la position symétrique.
J’ai toujours eu envie d’écrire avec cette possibilité de voir des
mises en images faites par d’autres. Comme j’étais ravi de cette
première collaboration, j’ai en effet exprimé ma volonté de continuer
cette histoire.
Rencontre artistique logique quand on voit la proximité de vos univers réciproques ?
JC
Denis : Il est clair que nous avons des terrains de prédilection en
commun. Nous partageons, par exemple, ce même intérêt pour le quotidien
avec un zeste de dérapage vers l’imaginaire. Si j’ai vite arrêté
d’utiliser la notion de rêve dans les histoires de Luc Leroi
[Casterman], eux ont continué à le faire…
Charles
Berbérian : Ce qui me plaît dans les scénarios de Jean- Claude, ce sont
leurs orientations obliques. Alors pour le sujet d’Un peu avant la
fortune, qui est en gros « j’ai le ticket gagnant et que vais-je faire
de tout cet argent ? », j’ai savouré la direction du récit. Son
scénario est basé sur ce climax. Je me suis refusé de le lire jusqu’au
bout, histoire de garder du recul sur sa cohérence mais aussi pour le
plaisir de la lecture…
Philippe
Dupuy : Son écriture est graphique et ses dialogues sont très écrits ce
qui est rare dans une BD. Cela donne une couleur…
Charles
Berbérian : Nous nous sommes rendu compte, lors des serrages de boulons
finaux, que bien souvent nous occultions la négation dans nos
dialogues. Par exemple, nous n’écrivons jamais « Je ne suis pas là… »,
mais « J’suis pas là ! ». Cela hérissait le poil de Jean-Claude. Alors,
nous les rajoutions. Il fallait respecter la musique de Jean-Claude.
Philippe
Dupuy : C’est un peu plus complexe que cela. Certains de nos
personnages, en fonction de leur appartenance sociale, marquent la
négation. Cela amène du sens sur ce qu’ils sont et sur leurs niveaux
d’éducation.
JC
Denis : Dans ce livre-là, tout le monde parle de la même manière. Comme
j’avais fait le choix de mettre la négation dès le début, j’ai été très
attentif sur leur rendu.
Aviez-vous établi une sorte de cahier des charges entre vous ?
Philippe
Dupuy : Nous avons une série de plusieurs bordereaux très précis qui
doivent être validés par plusieurs commissions de pré-scénario…
(Rires.)
Charles Berbérian : Nous avons très peu parlé de cela, ce qui nous a
d’ailleurs posé problème lors de la scène de carambolage de voitures.
Il nous a fallu dessiner des bagnoles sous toutes les coutures, or nous
détestons cela… Pour autant, Jean-Claude ne nous a pas donné de
direction de mise en scène comme peuvent le faire certains autres
scénaristes de bande dessinée. Nous n’aurions pas aimé cela.
Philippe
Dupuy : C’est une évidence. Je crois même que j’aurais refusé si cela
avait été le cas. Le plaisir de la mise en scène aurait disparu… C’est
important que chacun puisse s’approprier le travail de l’autre
JC
Denis : Un peu comme en musique. On propose quelque chose d’ouvert pour
que l’autre puisse y trouver sa place et donner son interprétation.